Traitements de conservation-restauration
Constat d’état
Lacune et enfoncement du sol
Certaines solives situées dans la cave et soutenant la dalle en chaux du rez-de-chaussée se sont altérées (pourrissement du bois, insectes..) et ont donc emportées avec elles la dalle ainsi que la mosaïque posées dessus. La partie la plus abimée se trouve dans l’entrée au niveau de la fenêtre où le sol est decendu de plusieurs centimètres. Il y a encore quelques mois les tesselles de mosaïques étaient en place bien que fracturées et fissurées. Mais depuis le sol c’est encore plus effondré et une intervention d’urgence a été mise en place afin de consolider la dalle de chaux ainsi que la mosaïque.
Les anciens comblements en béton réalisés probablement suite aux travaux de plomberie du chauffage ne seront pas démontés durant ce chantier car ils sont stables mécaniquement.
Opérations de restaurations (1ère tranche, in situ)
Lacune dans le sol et tesselles sous le radiateur
Prélèvement des éléments détachés autour de la lacune dans l’entrée. Les tesselles détachées et posées sous le radiateur sous la fenêtre appartiennent à la lacune de la mosaïque. Celles-ci, de grandes dimensions (3 à 6 cm) ont toutes été récupérées. De même Les morceaux de marbre fissurés ont été photographiés et consolidés avant leur détachement du sol.
Les plus petits morceaux restés dans le creux de la mosaïque et mélangés avec les éléments de mortiers et de dalle ont été tamisés afin d’être réutilisées.
Les ensembles de tesselles fissurées autour de la grande lacune ont également été prélevées mais après consolidation à leur surface par de la tarlatane et de la colle peau de lapin afin de garder les tesselles ensemble et de pouvoir les replacer après les travaux de dalle à leur place originelle.
Marbre à consolider dans la salle à manger
Reproduction du motif à restaurer sur du papier calque. La forme et la dimension de la lacune ont été dessinés sur une grande feuille de papier calque, à l’échelle 1/1.
Consolidation des tesselles de marbre en place. Les éléments fissurés ont été consolidés in situ avec de la colle de peau de lapin et de la tarlatane directement sur la mosaïque afin d’éviter de nouveaux soulèvements de tesselles durnt les travaux de maçonnerie et en attendant notre intervention de jointoiement. Le choix de la colle de peau de lapin, diluée à la chaleur, pour la consolidation ne modifie pas chimiquement la structure du marbre, est stable chimiquement à long terme, est réversible, et a un bon pouvoir adhésif sur le marbre.
Opérations de restaurations
(2ème tranche, en atelier)
Nettoyage des tesselles de marbre prélevées. Tous les éléments prélevés ont été nettoyés à sec avec un pinceau doux. Les éléments de mortiers de trop grandes épaisseurs (plus de 2 cm) ont été coupé à la pince métallique ou avec une marteline afin d’avoir la majorité des morceaux (tesselles de marbre et mortier) d’épaisseurs comparables.
Pose de la chaux sur du Fibralith. Afin de refaire le puzzle des tesselles de marbre détachées, celles-ci ont été posées sur une chape de chaux grasse en pâte, spécialement utilisée pour la restauration de mosaïque, d’environ 2 cm d’épaisseur qui sert de mortier temporaire et qui permettra de manipuler la mosaïque pour son transport. Le Fibralith est un panneau de fibres de bois qui permet de garder une grande humidité à la chaux et lui permet de sécher plus lentement et ainsi d’avoir un temps de travail de la chaux prolongé (5 jours).
Reproduction du contour de la lacune, dessiné sur le calque, sur la chaux. Le tracé réalisé sur le papier calque est reporté sur la chaux afin d’avoir les contours exactes de la lacune.
Pose des tesselles sur la chaux. Les tesselles détachées et prélevées in situ sont déposées sur la chaux en retrouvant les éléments de marbre suivant la seule photographie présentant les tesselles détachées mais encore en position. Les autres tesselles non reconnaissables sont disposées de façon esthétique afin d’avoir une homogénéité dans les couleurs et les motifs. Pour les lacunes restantes, une fois l’ensemble des tesselles originelles posées, des nouveaux morceaux de marbre sont découpés et posés sur la chaux. Ces nouvelles tesselles de marbre proviennet d’Italie et sont découpés de façon arbitraire à la marteline et à la pince afin de retrouver les motifs du granito.
Pose de la tarlatane sur la mosaïque. De la poudre de marbre est soupoudrée sur la mosaïque afin d’éviter la colle peau de lapin de pénétrer trop profondement dans les interstices des tesselles. De la tarlatane est posée sur la face de la mosaïque, puis enduite de colle peau de lapin avec un pinceau afin de consolider la mosaïque lors de son transport et d’en faciliter la dépose. Le séchage de cette étape est de 24h.
Opérations de restaurations (3ème tranche, in situ)
Décollement de la mosaïque. La mosaïque est détachée de son support de Fibralith avec l’insertion de couteaux fins entre la plaque de bois et la chaux. Puis les tesselles, toujours consolidées par la tarlatane collée, sont retournées et posées au sol afin d’éliminer la dalle de chaux de soutien et de retrouver le mortier originel. Le surplus de chaux est enlever au couteau fin et à la pince fine dans tous les interstices des tesselles. La tarlatane collée sur la face du marbre est découpée au plus proche des bords de la mosaïque.
Pose du ciment fibre. La lacune de mosaïque au sol est nettoyée et aspirée, les bords en relief contenant du ciment sont remis à niveau avec une scie circulaire et un disque « à matériaux ». Le ciment utilisé et posé sur la dalle en chaux et composé de fibre et est préconisé pour le collage de mosaïque au sol. Le ciment fibre est posé à la spatule de façon régulière et suivant la courbure du sol.
Pose de la mosaïque au sol. La mosaïque est retournée afin d’avoir la face vers le haut, et est manipulée précautieusement afin d’éviter le détachement de tesselles, même si celles-ci sont encore collées à la tarlatane. Elle est posée sur le ciment fibre encore humide et le niveau horizontal est contrôlé afin d’avoir une surface plane et en raccord avec la mosaïque de sol autour.
Certaines zones très fragilisées ont perdu des éléments de marbre. De nouveaux tessons de marbre moderne mais de coloris similaires ont été positionné suivant une gamme colorée et un dessin comparatif pris sur d’autres zones de la mosaïque. Les nouveaux éléments de marbre ont été assemblés en atelier suivant la technique de la dépose inversée pour les grands comblements ou directement sur place pour les fissures.
Elimination de la tarlatane. Après 24h de séchage du ciment fibre, la tarlatane de la mosaïque est éliminée après ramollissement de la colle peau de lapin par application d’eau chaude par des linges humides (de type serpillières). La tarlatane est retirée avec précaution et minutie afin de ne pas altérer la mosaïque sous jacente. Le surplus de colle est retiré par brossage avec de l’eau chaude.
Nettoyage des interstices. Le surplus de ciment fibre qui est remonté dans les interstices des tesselles de marbre est retiré mécaniquement avec une fine mèche placée sur un micro-moteur.
Jointoiement. L’ensemble des tesselles est re-jointé avec un joint-colle spécial mosaïque et additionné de pigments afin d’avoir une couleur de joint proche de l’originel (un gris-rosé pour le granito de l’entrée).
Les fissures, provoquées par la rupture et l’ouverture des joints, ont été également comblées avec un mélange de joint-colle et de pigments naturels afin d’obtenir un ton proche de l’originel.
Nettoyage final. Nettoyage en surface de façon mécanique et/ou chimique et/ou aqueux choisi en fonction de l’état de conservation des marbres et de la nature et de la consistance des salissures à enlever. Le nettoyage mécanique des dépôts peu adhérents s’est effectué par brossage avec un pinceau souple ou une brosse, par grattage avec un bâtonnet de bois ou encore avec une lame de scalpel. Le nettoyage à l’eau a été utilisé pour éliminer les dépôts solubles dans l’eau, soit par brossage soit par microjet de vapeur d’eau. Un test préalable de résistance à l’eau a été effectué avant tout traitement. Le nettoyage chimique concerne les dépôts non-solubles dans l’eau comme les graisses, cires et autres matériaux anciens de comblements de lacunes ne pouvant être éliminés mécaniquement (comme la laitance de ciment).
L’ensemble de la mosaïque a ainsi été nettoyée à la vapeur d’eau chaude (nettoyeur à vapeur) afin de retirer l’empoussièrement du aux divers travaux, et de retirer la laitance du joint sur les parties de mosaïques restaurées. Ce nettoyage a aussi éliminé les dépôts solubles dans l’eau et présents à la surface du marbre car les murs se désagrègent sous forme de salpêtre et de petits grains de sable tombent sur les pavements et risquent ainsi créer des dépôts salins qui peuvent altérer la surface de la mosaïque.
La mosaïque, située au niveau de l’escalier, est recouverte d’une importante laitance de ciment (probablement dû à un ancien jointoiement ciment), celle-ci a été nettoyée avec un produit « décapant » qui a été posé quelques secondes puis nettoyé à plusieurs reprises avec de l’eau tiède.
Pose de cire de protection. En attendant la fin des travaux de restauration de l’ensemble du château et au vu du passage quotidien d’ouvriers et des propriétaires sur la mosaïque de l’entrée, une protection à base de cire micro-cristalline a été posée sur l’ensemeble de la mosaïque de l’entrée. Celle-ci permet une protection de surface et permet de retrouver une certaine brillance pouvant rappeler celle d’origine, avant que l’usure du temps ne fasse se matifier la surface des marbres.
Mosaïque après restauration
Restauration: Travail réalisé par :
Catherine Juge Thouroude Natacha FRENKEL
catherinejuge@aol.com natfrenkel@aol.com
www.mosaiqueatelier.com www.artsdufeu.fr
Professionnelle de la mosaïque Restauratrice du patrimoine
antique et contemporaine Diplômée de l’INP-IFROA
Ecole de Ravenne Spécialisée en objets d’art et archéologie
(céramique, verre, émail, vitrail…)
Agréée par la Direction des Musées de France
Membre de l’ICOM